16 juillet 2025

5 choses à découvrir sur la posidonie

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La posidonie tire son nom de Poséidon, le dieu de la mer dans la mythologie grecque. Emblème de la Méditerranée, cette plante marine joue un rôle crucial dans le bon fonctionnement des écosystèmes côtiers. Pourtant, elle est aujourd’hui menacée par de nombreuses activités humaines, notamment l’ancrage des bateaux, la pollution et l’urbanisation du littoral. Voici cinq faits surprenants que vous ignoriez peut-être sur cette plante marine.

1 : Ce n’est pas une algue mais une plante à fleurs !

Souvent confondue avec une algue, la posidonie (Posidonia oceanica) est en réalité une plante à fleurs marine endémique de la Méditerranée. En effet, elle possède, contrairement aux algues, des racines, des tiges, des feuilles, des fleurs et des fruits. On retrouve la Posidonie entre la surface et 30 à 40 mètres de profondeur, formant de véritables prairies sous-marines, appelées herbiers, qui couvrent jusqu’à 50 % des petits fonds côtiers entre 0 et 50 m1. Ces herbiers se développent très lentement, à raison de 1 à 2 cm par an, mais peuvent vivre plusieurs milliers d’années !

La floraison de la Posidonie est un événement rare : elle ne se produit qu’environ tous les dix ans. Une fois formés, les fruits mettent 6 à 9 mois à mûrir 2,3. Entre mai et juillet, les fruits se détachent des plantes et flottent parfois jusqu’aux plages. On peut alors apercevoir ces petits fruits ovales, surnommés “olives de Posidonie” en raison de leur forme et de leur couleur qui rappellent celles des olives.

2 : Une forêt sous-marine, poumon de la Méditerranée

Le fonctionnement des herbiers de Posidonie s’apparente fortement à celui des forêts terrestres2. Cette analogie s’explique par la quantité exceptionnelle biomasse végétale (quantité de masse sèche/m²) qu’ils produisent : dans certains cas, celle-ci dépasse même celle des forêts tropicales ! La Posidonie joue alors un rôle essentiel dans la lutte contre le changement climatique en capturant et stockant du carbone dans les sédiments marins4. Grâce à son réseau dense de rhizomes, elle séquestre durablement ce « carbone bleu » dans une structure appelée “matte”, une accumulation, composée de racines, rhizomes et sédiments, compacte et presque imputrescible pouvant atteindre entre 1 et 2 mètres d’épaisseur2,5. Contrairement aux forêts terrestres, où le carbone va être relâché dans l’atmosphère, le carbone stocké dans la matte reste piégé pendant des siècles, voire des millénaires, faisant de ces écosystèmes marins un levier puissant et durable pour la régulation du climat4.

3 : Une oasis de vie dans une mer pauvre en nutriments

La Méditerranée est une mer dite oligotrophe : elle contient peu de nutriments6. Pourtant, les herbiers de Posidonie s’y épanouissent et forment le premier pôle de biodiversité, regroupant 20 à 25 % des espèces animales et végétales méditerranéennes1 ! Les herbiers de Posidonie jouent alors plusieurs rôles écologiques fondamentaux : ils servent de zones de nutrition, de reproduction (frayères), de croissance (nurseries) et d’abri pour de nombreuses espèces y compris des espèces protégées telles que la grande nacre (Pinna nobilis) ou encore l’hippocampe tacheté (Hippocampus guttulatus)1. Riches en poissons, les herbiers soutiennent directement la pêche artisanale : on estime que 30 à 40 % de la valeur des poissons débarqués en Méditerranée proviennent d’espèces liées aux herbiers marins7.

4 : Un rempart naturel contre l’érosion

Les herbiers de posidonie jouent un rôle clé dans la protection du littoral contre l’érosion en amortissant les vagues et la houle8. De plus, à l’automne, la posidonie perd ses feuilles qui peuvent alors s’échouer sur le littoral et former un amas brun sur la plage appelé “banquette9. Composée principalement de feuilles et de fragments de rhizomes de Posidonie ainsi que de sédiments, cette banquette peut atteindre jusqu’à deux mètres de hauteur selon les régions3,9,10. Elle agit alors comme un rempart naturel contre l’érosion en amortissant l’énergie des vagues et en retenant le sable3. Malgré son importance écologique, la banquette de Posidonie est souvent enlevée en été pour des raisons esthétiques, afin de ne pas nuire à l’attractivité touristique3. Ce nettoyage mécanique, réalisé à l’aide d’engins motorisés, perturbe l’équilibre du littoral. Une prise de conscience émerge chez de plus en plus d’élus et gestionnaires du littoral, qui commencent à reconnaître le rôle fondamental de la banquette et à repenser la gestion des plages.

5 : Un trésor méditerranéen menacé mais des initiatives existent

La posidonie bénéficie de nombreux statuts de protection : elle est reconnue comme habitat prioritaire à l’échelle européenne et figure dans plusieurs conventions internationales (Berne et Barcelone)1. En France, elle est protégée depuis 1988 par un arrêté ministériel interdisant sa destruction1. Ces protections ne suffisent pas cependant toujours à la préserver : l’aménagement du littoral, le réchauffement climatique, les ancres de bateaux ou encore les espèces invasives continuent de fragiliser cet écosystème pourtant essentiel à la santé de la Méditerranée1,2,5,11 .

Face aux nombreuses pressions qui menacent la posidonie, plusieurs initiatives ont vu le jour pour contribuer à sa préservation. L’application DONIA permet aux plaisanciers de localiser les zones de mouillage sans risque pour les herbiers, contribuant ainsi à limiter leur dégradation12. Le GIS Posidonie a lancé le projet REPOSEED, qui explore une méthode douce de restauration écologique par la replantation de graines issues de la floraison exceptionnelle de 2022, afin de renforcer la résilience des herbiers13. À Marseille, des actions visent à préserver les banquettes de posidonie échouées sur les plages durant l’été, en expérimentant une gestion raisonnée et respectueuse de leur rôle écologique, ainsi que des techniques de nettoyage plus douces14. Enfin, le programme de sciences participatives BioLit, à travers sa thématique « Saisons de la mer », mobilise les citoyens pour étudier ces banquettes et collecter des données précieuses au service des gestionnaires du littoral.

Bibliographie :

  1. Sartoretto S. et Baucour C. « Habitats Particuliers de l’infralittoral : Herbier à Posidonia Oceanica. Sous-Région Marine Méditerranée Occidentale. Evaluation Initiale DCSMM. », (2012). https://archimer.ifremer.fr/doc/00331/44204/.
  2. Boudouresque C-F., Bernard G., Bonhomme P., Charbonnel E., DIVIACCO G., MEINESZ A., Pergent G., Pergent-Martini C., Ruitton S. et Tunesi L., (2006). Préservation et Conservation Des Herbiers à Posidonia oceanica.
  3. Boudouresque C-F., Ponel P., Patrick A., Barcelo A. et Blanfuné A., « The high heritage value of the Mediterranean sandy beaches, with a particular focus on the Posidonia oceanica “« banquettes »”: a review ». Scientific Reports of the Port-Cros National Park 31 (2017): 23‑70.
  4. Pergent-Martini, C., Pergent G., Monnier B.., Boudouresque C-F., Mori C. et Valette-Sansevin A., « Contribution of Posidonia oceanica meadows in the context of climate change mitigation in the Mediterranean Sea ». Marine Environmental Research 165 (2021): 105236. https://doi.org/10.1016/j.marenvres.2020.105236.
  5. Boudouresque C-F., Pergent G., Pergent-Martini C., Ruitton S., Thibaut T. et Verlaque M., « The necromass of the Posidonia oceanica seagrass meadow: Fate, role, ecosystem services and vulnerability ». Hydrobiologia 781, no 1 (2016): 25‑42. https://doi.org/10.1007/s10750-015-2333-y.
  6. Berman T., Azov Y., et Townsend D., « Understanding Oligotrophic Oceans : Can the Eastern Mediterranean Be a Useful Model ? » In Marine Phytoplankton and Productivity: Proceedings of the Invited Lectures to a Symposium Organized within the 5th Conference of the European Society for Comparative Physiology and Biochemistry — Taormina, Sicily, Italy, September 5–8, 1983, édité par O. Holm-Hansen, L. Bolis, et R. Gilles, 101‑12. Berlin, Heidelberg: Springer (1984). https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-3-662-02401-0_9.
  7. Jackson E., Siân L., Rees E., Wilding C., et Attrill M-J., « Use of a seagrass residency index to apportion commercial fishery landing values and recreation fisheries expenditure to seagrass habitat service ». Conservation Biology 29, no 3 (2015): 899‑909.
  8. Infantes E., Orfila A., Simarro G. et Terrados J., « Effect of a seagrass (Posidonia oceanica) meadow on wave propagation ». Marine Ecology Progress Series 456 (2012): 63‑72. https://doi.org/10.3354/meps09754.
  9. INPN, Museum national d’Histoire. « II.3.1.a. – Faciès des banquettes de feuilles mortes de Posidonia oceanica et autres macrophytes (NatHab-Méditerranée) ». Inventaire National du Patrimoine Naturel. Consulté le 28 mai 2025. https://inpn.mnhn.fr/habitat/cd_hab/3744.
  10. « Qu’est-ce qu’une plage méditerranéenne sans sa banquette de Posidonie ? – GIS Posidonie », 31 mars 2023. https://gisposidonie.osupytheas.fr/?p=4010.
  11. Boudouresque C-F, Blanfune A. et Fernandez C., « Marine biodiversity warming vs. biological invasions and overfishing in the Mediterranean Sea: Take care, ‘One Train can hide another’ ». MOJ Eco Environ Sci, (2017), 172‑83. https://doi.org/10.15406/mojes.2017.02.00031.
  12. « Donia – Naviguer, ancrer et protéger ». Consulté le 11 juin 2025. https://donia.fr/.
  13. « Le projet REPOSEED, ou comment tester une méthode de restauration écologique douce à partir de graines pour accompagner la résilience de l’herbier de Posidonie – GIS Posidonie », 20 juillet 2023. https://gisposidonie.osupytheas.fr/?p=4088.
  14. Ville de Marseille. « Plan Posidonie ». Consulté le 11 juin 2025. https://www.marseille.fr/mer/patrimoine-et-loisirs/plan-posidonie.

Auteur : M. Alarcon

Crédit photo : BioLit-Poisson Charlotte

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